Bien avant le protestantisme, dès les premiers siècles, il y a eu le gnosticisme, le marcionisme, l’ébionisme, l’adoptianisme, l’arianisme, le docétisme, le pélagianisme, le nestorianisme, le monophysisme, l’iconoclasme, etc. Et plus tard, il y a les cathares, les vaudois, les jansénistes, les unitariens, les modernistes et toutes sortes de millénarismes.
Par le charisme de discernement très particulier qu’elle a reçu du Christ et que lui garantit l’assistance permanente de l’Esprit Saint, l’Église a sans cesse préservé l’orthodoxie de la foi ; elle a tenu bon contre toutes les propositions visant à simplifier, à rendre plus accessible ou plus acceptable la foi reçue des apôtres. Cela impliquait de tenir ensemble, parfois, des réalités qui semblaient paradoxales à vue humaine ; mais c’est en tenant ces paradoxes que l’Église a pu faire avancer sa théologie dans le sens d’un approfondissement et non d’une réduction.
Contrairement à ce que beaucoup croient, Luther et ses imitateurs n’ont pas voulu au départ fonder une autre Église. Ils ont simplement considéré que les papes et les évêques de leur époque étaient indignes, dans l’erreur, qu’il fallait retrouver la foi de toujours et reconstruire la véritable Église du Christ en partant de leur propre jugement. C’est ni plus ni moins [AD1] la démarche des intégristes aujourd’hui encore. Le problème est exactement le même : eux aussi, en s’opposant à l’Église, en prétendant que leurs critiques sont justes, en absolutisant leurs propres règles, leurs propres principes et leurs propres visions, inventent, de fait, un nouveau Magistère : le leur. Mais cela ne va pas car un seul magistère vient du Christ et a été institué par lui : celui de l’Église. Et c’est cela qui change tout.
Avec le développement d’Internet et notamment de YouTube, on constate aujourd’hui une explosion incroyable du nombre des personnes qui prétendent avoir compris le fonctionnement du monde et qui voudraient nous l’expliquer. Ils font tout cela à partir de leurs petits raisonnements et de leur enquête personnelle, mais sur quoi cela repose-t-il ? « Quand les aveugles guident les aveugles, ils tombent dans un trou » (Mt 15,14) nous a prévenus le Christ. Comment pourrait-il en être autrement ? Qui - sinon Dieu lui-même - a assez de savoir et de science pour proposer une juste et globale vision du monde ? Ces multiples tentatives d’explication de Youtubeurs improvisés qui proposent des visions New Age ne sont que des inventions des hommes. Quand nous les écoutons, demandons-nous toujours (et demandons-leur aussi !) d’où vient leur savoir ? Sur quoi leur certitude repose-t-elle ? Comment peuvent-ils enseigner avec autorité ? Leur magistère n’a pas d’autre fondement que leur petit cerveau ! Et lorsqu’ils en viennent à reconstruire le monde avec une nouvelle théorie, cela ne vaut pas grand-chose, bien sûr. On pourrait leur poser la même question que celle que les pharisiens posaient à Jésus : « Par quelle autorité enseignes-tu ? » (Mt 21,23) ; tous répondraient « de ma propre autorité » ou « de celle de mon groupe », mais tout cela reste irrémédiablement humain et infiniment loin de pouvoir embrasser tous les mystères de l’Univers. C’est différent de l’Église qui enseigne l’essentiel au nom de Dieu, revêtue de son autorité, parce que le Christ a décidé qu’il en serait ainsi. La question du Magistère est la question clé : vient-il des hommes ou de Dieu ?
Pourquoi l’Église est-elle finalement la seule institution au monde à avoir développé une pensée cohérente sur Dieu, la création, l’homme, le bien et le mal, etc. ? Parce qu’il n’y a qu’un seul magistère légitime qui vient du Christ et qui a été institué par lui : celui de l’Église. Et c’est cela qui change tout.
Le Christ était très sévère contre tous les fondateurs des autres sectes, doctrines ou religions, c’est à-dire contre tous ceux qui prétendaient être à sa place les bergers du troupeau : « Tous ceux qui sont venus avant moi (et il en a été ainsi après !) [AD2] sont des voleurs et des bandits » (Jn 10,8).
La confusion règne dans le monde d’aujourd’hui mais, dans l’avenir, la promesse de Dieu est qu’il y aura « un seul troupeau et un seul berger » (Jn 10,16).
Il est étonnant que l’Évangile affirme de Pierre tout ce qui en droit doit être d’abord affirmé de Jésus (être le « Berger » (Jn 21,16), le « Roc » (Mt 16,16), le « fondement » (Mt 16,17), avoir les « clés » (Mt 16,18) pour « ouvrir et fermer ; lier et délier », avoir le « jugement » (Mt 16,19), être le « grand prêtre », etc.). On ne peut pas dire plus clairement que l’autorité de Pierre est l’autorité de Jésus lui-même. La Parole du Christ ne passe pas et les papes successifs sont assis dans la chaire de Pierre, bien plus grande que la « chaire de Moïse » (Mt 23,2), contre laquelle « les portes de l’enfer ne l’emporteront pas » (Mt 16,19).
À Capharnaüm, au bord du lac, la maison de Pierre, qu’il partageait avec sa belle-mère est une humble maison de roc grossier, le basalte noir, la pierre volcanique du pays, dont se servaient les pauvres pour construire leurs abris. Et c’est là que Jésus habitait. C’était « sa maison », disent les évangélistes (cf. Mc 3, 20). Car c’est toujours dans l’Église de Pierre que le Seigneur habite. Simon, Pierre[AD3] , Jean-Paul, Benoît, François... : changement de nom, mais pas d’adresse. Lin, Clet, Clément, Sixte, Corneille, Cyprien, Innocent et Pie ou Grégoire : c’est toujours dans la maison de Pierre qu’habite le Verbe de Dieu.
Les catholiques ont ainsi la chance d’être déjà membres de cette unique bergerie fondée par le Christ et conduite par son vicaire. Mais que font-ils de ce cadeau extraordinaire ? Qu’ils ne restent pas les bras croisés car « À ceux qui ont beaucoup reçu, il sera beaucoup demandé », avertissait également Jésus (Lc 12,48). Or, personne n’a reçu autant que nous, les fidèles catholiques, qui disposons de la plénitude des moyens du salut, mais qu’en faisons-nous ? Où est notre dynamisme apostolique ? Sur ce plan, les protestants évangéliques nous surpassent mille fois et nous devrions donc avoir honte plutôt que de faire les malins… Certes, il est vrai qu’un seul magistère vient du Christ et a été institué par lui et que c’est celui de l’Église. Mais quand on l’a compris, on a encore bien davantage la responsabilité de le servir et d’en être aussi digne que possible...
Agissons donc et ne jugeons jamais les autres : jusqu’à ce que vienne le Prince des pasteurs, en effet, les brebis et les boucs sont mêlés dans le même troupeau (cf Mt 25). « Le Seigneur nous a ordonné de réunir et il s’est réservé de séparer. Car celui-là seul doit séparer, qui ne peut se tromper », explique ainsi saint Augustin qui disait aussi : « Beaucoup de ceux qui sont ouvertement hors de l’Église valent mieux que beaucoup de Catholiques. » Que les serviteurs orgueilleux ne prétendent pas opérer le discernement que le Seigneur s’est réservé, de peur de se couper eux-mêmes de l’unité catholique & que les pécheurs ne se bercent pas d’illusions en répétant « Église du Seigneur, Église du Seigneur » (Jr 7,4-11), comme si leur appartenance à l’Église les mettait à l’abri du jugement et de la colère qui viennent… À nous donc de faire fructifier l’héritage, les talents et les cadeaux que le Seigneur nous a confiés !
[Lien perdu] « ni plus ni moins » pour éviter la répétition du mot « exactement »
[Lien perdu]en noir
[Lien perdu]Simon-Pierre ?